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Qu'est-ce que la Politique ?

Le texte ci-dessous est une contribution de Mme Marie-Thérèse Avon-Soletti. Il décrit ce que doit être le moteur de toute politique suivant la doctrine catholique traditionnelle, selon des principes pressentis en son temps par Socrate puis développés par Saint Thomas d'Aquin.


Qu’est-ce que la politique ?


Platon nous l’explique par la voix de Socrate dans le Gorgias.

Dans ce livre, le sujet est la rhétorique ou l’art de persuader les autres





Le courant sophiste : remporter la victoire

Pour les sophistes et les jeunes gens qui discutent avec Socrate

La politique consiste à influencer le cours des choses. Le discours politique est prononcé pour flatter les citoyens, pour plaire aux citoyens. En fait, il consiste à persuader les citoyens d’agir de la façon qui plaît à celui qui le prononce. Le discours flatte les citoyens pour les inciter à agir dans le sens qui convient à l’homme politique.

L’action avant tout et l’action pour faire triompher ses idées. Voilà la politique pour les jeunes gens instruits et les sophistes avec lesquels Socrate discute.


Or, cette façon de faire amène au pouvoir les plus pervers et les plus cyniques, ceux qui sont à la fois rusés et sans scrupule. Et la politique de la cité s’en ressent. Les lois mauvaises se succèdent détruisant la société.

Et lorsque d’autres hommes politiques veulent sortir de cet état, dans la mesure où ils agissent de la même façon, où tout leur effort est tourné vers la persuasion de la foule, vers le triomphe de leurs idées et de leur volonté humaine, vers le seul fait d’influencer le cours des choses, même s’ils ne le veulent pas, ils finissent par ressembler aux autres, par se fondre dans le même moule.

Combien de nationalistes, d’hommes de gauche, de centre, de droite sont entrés en politique pour faire changer les choses ? Certains ne pensaient qu’à leur carrière et au profit. Mais beaucoup y croyaient. Beaucoup souhaitaient sincèrement construire et travailler à réaliser quelque chose de bien. Un bon nombre avait même du talent. Mais, tous, les uns après les autres, en arrivent à dire et à faire à peu près la même chose. Et cela est valable, non seulement pour la France mais pour l’ensemble des pays.


Pourquoi ? Parce que le but reste en priorité la victoire, la domination, la victoire d’un camp sur l’autre, la domination que procure le triomphe de ses idées et quand les idées disparaissent, le triomphe qui permet de gagner le pouvoir et de s’y maintenir.


Au début, le combat se déroule pour faire triompher un projet politique. Puis, bien vite quand le projet se révèle sans consistance ou irréalisable, c’est le pouvoir lui-même, le pouvoir pour le pouvoir qui devient le seul but.

Agir, faire table rase du passé, construire une société de toutes pièces selon ses propres vues, ses propres volontés, il y a là quelque chose d’enivrant qui attire les hommes (hommes et femmes) par cet activisme trompeur.

Le but se rétrécit à un combat de personnes, le plus fort ou le plus rusé l’emporte sur l’autre. Le plus fort ou le plus rusé sait manier la foule pour la faire agir dans son sens.


Le but : le pouvoir. Le moyen : la flatterie, le mensonge ou la violence quand les premiers moyens n’opèrent plus.

Parvenir au pouvoir et garder le pouvoir par tous les moyens.

La fin justifie les moyens.


Le courant socratique : faire triompher la vérité pour le bien de la cité

Or, Socrate insiste, même s’il est seul à soutenir une telle pensée. Ce ne sont pas le pouvoir et la domination sur l’autre qui comptent, mais le bien de la cité.

Le but ne s’arrête pas à la volonté d’une personne ou d’un groupe de personnes qui veut imposer sa volonté, le but ne s’arrête même pas à la totalité d’une population qui agirait selon sa seule volonté.

Volonté particulière ou générale peuvent s’avérer aussi mauvaises, aussi désastreuses pour la cité. Ce n’est donc pas la volonté qui importe, mais le bien recherché.

Le but réside, non dans les personnes, mais dans le bien, dans ce qui peut amener une cité à être prospère et juste et paisible, une cité où les hommes sont heureux de vivre.


Ce ne sont pas les personnes au pouvoir qui doivent triompher, mais seulement le bien de la cité.


De la même façon, dans un débat, ce n’est pas le triomphe d’une personne sur une autre qui compte, mais la recherche et le triomphe de la vérité.

Les débats sont faussés parce que tout le monde cherche à triompher de l’autre. Les spectateurs ne cherchent plus à savoir si les arguments sont sérieux ou non. Ils s’attachent uniquement à l’esprit de répartie, au bon mot qui ridiculise l’adversaire ou à l’accusation fausse qui déstabilise...


Dans les discussions, Socrate explique que la vérité doit être au centre des débats.

Dans le domaine politique, la justice doit être à la source des lois et le bien de la cité le but recherché.

Recherche et triomphe de la vérité.

Recherche et établissement de la justice et du bien.


Tant que le but véritable est le pouvoir et la domination, les idées resteront au service du cette soif de pouvoir et de domination. Alors, elles seront infectées par le mensonge, la flatterie, la violence. Car tout sera bon pour arriver à ces fins de domination sur l’autre.

La haine est souvent une conséquence de cet état d’esprit parce que l’autre devient l’obstacle qu’il faut enlever pour satisfaire sa volonté.


Si le but véritable est la vérité et le bien, alors les idées se mettront au service de la vérité et du bien. Elles seront inspirées par la vérité, la justice et le bien. Et la fin ne sera plus la domination de l’homme sur l’homme, mais le triomphe de la vérité et la recherche du bien de la cité.

Nous sommes cinq siècles avant Jésus-Christ et le courant de droit naturel sort de la philosophie grecque et de la pensée de Socrate, qui ne dit jamais qu’il a inventé quoi que soit. Il ne professe pas de théorie personnelle. Simplement, il cherche la vérité avant tout.


Bien sûr, il se fera tuer pour avoir dit la vérité.


Le courant de droit naturel se poursuit dans le christianisme qui le développe en une doctrine

Le christianisme continue ce courant de droit naturel et le développe dans une véritable doctrine dont la synthèse la plus accomplie est celle de Saint Thomas d’Aquin.





La vérité au centre. Socrate, Platon à sa suite poursuivent cette recherche de la vérité.

Pour les chrétiens, la vérité c’est le Christ. Dieu est amour, donc Il est vérité, car l’amour n’existe pas dans le mensonge. La vérité prend un visage qui est celui du Sauveur et elle devient accessible à tous puisque chaque chrétien est le temple de Dieu (1Corinthiens 3, 16-17).


La liberté. Socrate, Platon à sa suite, ont l’intuition d’un lien entre vérité et liberté sans parvenir à savoir le quel vient en premier.

Le Christ donne la réponse avec la simplicité de Dieu : « La vérité vous rendra libres » (in Saint Jean 8, 32).

Les Grecs et les Romains connaissent les libertés politiques. Mais, c’est le christianisme qui apporte en plus, par la Révélation du Christ, les libertés personnelles et les libertés de la communauté. Chaque être humain ayant une vocation à accomplir, un talent qu’il doit développer pour épanouir sa personnalité, il dispose de la liberté nécessaire pour sa réalisation. De là découle les libertés personnelles.


La justice et le bien. Socrate, Aristote à sa suite, ont cette intuition d’une source dans la justice et d’une fin dans le bien.

Pour les chrétiens, la source de tout est Dieu qui est juste.

La fin de tout est Dieu qui est le bien.

Donc, la justice doit être à la source de tous les rapports entre les êtres humains (et donc des coutumes et des lois).

Le but se trouve dans le bien. Le bien parfait dans la vie éternelle doit être préparé sur terre.

Le but recherché est non seulement le bien de la cité, mais un bien qui englobe chaque membre de la cité : le bien commun.


Il ne s’agit pas seulement du bien de tous au sens de satisfaction de la volonté de chacun, mais le bien de chaque personne qui aspire à s’élever vers Dieu, c’est-à-dire qui aspire à développer son talent pour être réellement à l’image de Dieu.

Le bien commun est atteint quand tous les membres ont la possibilité de développer leur talent, d’accomplir leur vocation, quand tous ont cette faculté d’épanouir leur personnalité.

La politique, c’est la recherche de la justice dans la source des rapports entre les êtres humains et du bien commun comme but à atteindre.


Donc, le pouvoir change fondamentalement d’aspect. Il se produit une inversion des perspectives.


1) Le pouvoir n’est pas une fin en soi. Le pouvoir est un moyen de parvenir à la fin qui est le bien commun.


2) Le pouvoir n’est pas une domination. Le pouvoir est un service.

« ...celui qui voudra devenir grand parmi vous, se fera votre serviteur, et celui qui voudra être le premier d’entre vous, se fera votre esclave. C’est ainsi que le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi mais pour servir » (in Saint Matthieu 20, 27-28).


Pour arriver à cet état d’esprit, il faut :


1) Abandonner le monde de l’idéologie qui n’est que le mensonge au service de l’esprit de domination, et entrer dans le courant de droit naturel qui a pour centre la vérité.


2) Extirper toute haine de son cœur (qui accompagne toujours l’idéologie), et avancer sur ce chemin de vérité du courant de droit naturel pour penser à construire pour le bien commun, pour que chaque membre de la communauté puisse épanouir sa personnalité.


Voilà la raison pour laquelle la politique exige :

D’abord une doctrine solide sur laquelle s’appuyer : la doctrine de l’église de droit naturel.


Ensuite une société saine capable de produire des hommes politiques qui accepteront de travailler pour la vérité et d’être au service du bien commun : une société catholique.


La politique ne peut être cohérente et bienfaisante que quand les deux premières étapes ont été franchies.


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