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La Corse, un KATHEKON européen ?





Le Kathekon est un concept biblique qui a par la suite été développé en une notion de philosophie politique. On le trouve dans l'épître aux Thessaloniciens, dans un contexte eschatologique: le chrétien ne doit pas se comporter comme si le Temps du Seigneur pouvait intervenir le lendemain, puisque le Fils de la perdition (l'Antichrist de Jean, 1 et 2) doit être révélé avant. Paul ajoute ensuite que la révélation de l'antéchrist est subordonnée à la suppression de "quelque chose ou quelqu'un qui le retient et l'empêche d'être pleinement manifestée". L'interprétation de ce passage a soulevé de nombreux problèmes, puisque Paul ne parle pas clairement. On a donné les interprétations suivantes: Le katechon serait: Le Nom de Dieu (ou la présence de Dieu), le Saint-Esprit, l'Église catholique (et le sacrifice perpétuel de l'Eucharistie) le Pape ... l’épitre aux Thessaloniciens, Paul dit aux fidèles : « Ne vous souvenez-vous pas que je vous disais ces choses, lorsque j'étais encore chez vous ? Et maintenant vous avez vu le Katechon, afin qu’il soit révélé quand le temps sera venu. Car le mystère de l'iniquité agit déjà ; il faut seulement que le Katéchon ait disparu. Et alors paraîtra l'impie, que le Seigneur Jésus détruira par le souffle de sa bouche, et qu'il anéantira par l'éclat de son avènement. » Le mystère de l’iniquité existait donc déjà dans l’antiquité, mais ne prévalait pas du fait de la présence du Katéchon.





Qu'’est-ce donc que ce Katéchon (κατέχων) dont peu de gens ont entendu parler même à la messe ? Si le mot est peu connu c’est que la plupart des traducteurs de la Bible le traduisent par « ce qui retient » Mais cette traduction fait disparaître une particularité : Étrangement ce mot Katéchon apparaît sous deux genres différents dans le texte grec : tous d’abord avec l’article masculin (ὁ) et ensuite avec l’article neutre (τὸ), laissant d’abord penser que c’est une personne puis qu’il s’agit d’une chose. L’idée la plus répandue chez les pères de l’Eglise était que le Katéchon de genre neutre est l’Esprit Saint, mot qui est aussi du genre neutre en grec. Esprit étant la traduction du grec Pneuma qui signifie souffle. Mais il reste cet étrange usage du genre masculin. Aussi, les pères de l’église se sont longuement demandé si cette ambivalence personne/chose se résumait à l’Esprit Saint ou s’il agissait en fait de deux Katéchon séparés, l’Esprit Saint et une personne qui a reçu l’Esprit Saint.

Appliquant les paroles du Christ « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. » (Matthieu 22 :21) l’Eglise joue alors, ce que Montesquieu définira comme un pouvoir séparé, un contre-pouvoir moral, mais demeure soumise au pouvoir temporel de l’empereur. C’est ce qu’on appellera (à partir du XIXe siècle) le Césaropapisme. Pépin-le-Bref cherche à renverser la dynastie mérovingienne déjà affaiblie et à se faire légitimer comme roi des Francs. Afin d’obtenir l’accord du Pape, Pépin lui cède le territoire de Ravenne qu’il a pris à l’empereur romain et se propose de le remplacer en tant que protecteur de l’église latine. Dès lors, le Pape devient lui même souverain des états pontificaux et s’affranchit de l’empereur romain. Il se place désormais au dessus des rois et des empereurs, qu’il oint, reprenant ainsi l’ancienne coutume hébraïque. Les patriarches d’Orient, habitués à un gouvernement synodal et œcuménique de l’église, résistent aux prétentions monarchiques du Pape. Le fossé se creuse un fossé grandissant entre les deux églises sœurs. Par la suite l’église latine justifie cette évolution par la théorie des deux glaives. Vers 1129 Saint Bernard, abbé de Clairvaux affirme que le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel doivent tous deux être détenus par le Pape. Une nouvelle doctrine qui permet à des moines de manier l’épée et fonde l’ordre des templiers. Le Pape suivant, Innocent II, (mal) élu en 1130 se mit à porter une couronne en tant que souverain des états pontificaux. En 1301, Boniface VIII ajouta une deuxième couronne pour signifier son autorité spirituelle au dessus de l'autorité civile. Enfin Benoît XII, en 1342, ajouta une troisième couronne, qui a donné son nom à la Tiare, afin de symboliser son autorité sur tous les monarques. Le Pape était depuis couronné avec cette formule : « Recevez la tiare ornée de trois couronnes et sachez que vous êtes le père des princes et des rois, recteur de l'univers et sur terre vicaire de Jésus-Christ notre Sauveur. » Ainsi le Pape revêtait la fonction de Katéchon alors que l'église incarne le Paraclet.Quel que soit la personne qui incarne le Katechon, l’expression de son action dans le monde est la moralisation. Le Katéchon est donc la morale et son retrait du monde est la condition de la venue de l’Inique (ἄνομος).

Au delà des symboles, le recul de l’influence morale du christianisme semble bien correspondre à la prophétie du retrait du Katéchon que Paul annonçait aux Thessaloniciens. Le législateur, en Occident, a désormais un tout autre référentiel que celui de la culture chrétienne. Pour Carl Schmitt, juriste de profession , la figure du katechon qu'il inaugure dans sa Théologie politique (1922) est celle qui, par son action politique ou par son exemple moral, arrête le flot du déclin, la satanisation totale de ce monde de l'en-deçà. Lecteur attentif du “Nouveau Testament”, Schmitt construit sa propre notion du katechon au départ de la Deuxième Lettre aux Thessaloniciens de Paul de Tarse. Le Katechon est la force (un homme, un État, un peuple-hegemon) qui arrêtera la progression de l'Antéchrist. Schmitt valorise cette figure, au contraire de certains théologiens de la haute antiquité qui jugeaient que la figure du katechon était une figure négative parce qu'elle retardait l'avènement du Christ, qui devait survenir immédiatement après la victoire complète de l'Antéchrist. Schmitt fonde justement sa propre théologie civile, après avoir constaté cette différence entre les théologiens qui attendent, impatients, la catastrophe finale comme horizon de l'advenance de la parousie, d'une part, et, ceux qui, par le truchement d'une Theologia Civilis tirée en droite ligne de la pratique impériale romaine, veulent pérenniser le combat contre les forces du déclin à l'œuvre sur la Terre, sans trop se soucier de l'avènement de la parousie.


Carl SCHMITT et le Katechon comme notion de theologia civilis





Parousie vient du grec ancien παρουσία / parousía qui signifie « présence » (ou encore « arrivée », « venue »). Ce terme est utilisé en théologie. Le mot désignait dans le monde gréco-romain la visite officielle d'un prince. Les premiers écrits chrétiens, et notamment ceux de saint Paul, emploient ce mot pour désigner la première venue du Christ parmi les hommes, inaugurant les temps messianiques et l'avènement glorieux (2e venue) du Christ sur terre à la fin des temps. Schmitt choisit la voie de l'homme d’État, du juriste d'inspiration solaire contre le millénarisme de ce qui était une secte populaire émergée des catacombes.


Cette prise de recul "romaine" de Schmitt n'est pas sans évoquer les pages de Julius Evola: "Ce sont les "hommes qui se déclarent pour l’État et l'empire, ce sont les esprits possédant des affinités "matriarcales" qui choisissent le "peuple", le Volk; c'est là une distinction profonde, qui touche à l'essence même des individus. "Afin qu'une nation ou qu'une race atteigne le plan supérieur auquel correspond l'idée d’État ou d'Empire, il faut qu'elle soit frappée et transformée par la "foudre d'Apollon"" et cette loi ne souffre pas d’exceptions."


La réalité, c'est qu'il y a peuple et peuple...


Les sociétés humaines, politiques, perdent progressivement leurs valeurs sous l'effet d'une érosion constante. Le katechon travaille à gommer les effets de cette érosion. Il lutte contre le mal absolu, qui, est l'A-nomie (ou état d'une société caractérisée par une désintégration des normes qui règlent la conduite des hommes et assurent l'ordre social). Le terme anomie est aussi utilisé pour désigner des sociétés ou des groupes à l'intérieur d'une société qui souffrent du chaos dû à l'absence de règles de bonne conduite communément admises, implicitement ou explicitement, ou, pire, dû au règne de règles promouvant l'isolement ou même la prédation plutôt que la coopération.


Le Katechon restaure les valeurs, les maintient à bout de bras. Finalement, Schmitt a été tenté de penser que le katechon n'existait pas encore, alors que l'anomie est bel et bien à l'œuvre dans le monde, mais que des “initiés” sont en train de forger une nouvelle Theologia Civilis, à l'écart des gesticulations des vecteurs du déclin. C'est de ces ateliers que surgira, un jour, le nouveau katechon historique, qui mènera une révolution anti-universaliste, contre ceux qui veulent à tout prix construire l'universalisme, arrêter le temps historique, biffer les valeurs, et sont, en ce sens, les serviteurs démoniaques et pervers de l'Antéchrist.


Julius Evola : "Ce sont les hommes qui se déclarent pour l’État et l'Empire !"






Désormais, le décor est posé et chacun aura pu se reconnaître selon ses options politiques; mais quand est-il de la Corse ? la Corse contemporaine est un nid de corruption. Il s'agit d'un mécanisme qui dévale du haut de la société, comme nos sénateurs mis en examen, jusque tout en bas, si nous prenons l'exemple de ces artisans bastiais qui payent la mafia pour un marché et, pour s'y retrouver dans leurs frais, "oublient" de placer le ferraillage dans les fondations des maisons etc... Sans parler de la mafia corse qui sévit dans les anciennes colonies françaises... Prenons plutôt l'exemple du Lycée Agricole de Sartè, qui a l'avantage de mouiller l'ensemble de la classe politique sans exception: Son emplacement était prévu à Aléria, dans un cadre de développement en relation avec les exploitants locaux. En définitive, son installation à Sartè s'est jouée sur un méchoui à Livia (village longtemps sous tutelle dont le maire Roccaserriste a été par la suite déchu de ses droits civiques pour avoir eu un emploi fictif au PNRC) entre Dominique Bucchini et un ministre de l'époque en visite en Corse. Au début des années 90, les nationalistes qui étaient appuyés par Pasqua commencent à placer leurs hommes dans les administrations; dont le Lycée Agricole de Sartè. Problème: le nouveau directeur fait mener grand train à sa famille grâce au chéquier du lycée (études, courses de rallye etc.). De la Préfecture jusqu'à la Région, tout le monde a signé divers documents compromettants sans ouvrir les yeux. Quand le scandale est apparu (1,5 million d'euros impayés), pour ne pas laisser comprendre concrètement à l'opinion son incapacité chronique à gérer "les affaires" et à ne pas devoir prendre ses responsabilités devant la justice, toute la classe politique de l'époque l'a étouffée. Pour acheter leur silence, quelques membres du personnel qui n'avaient que le BEPC se sont retrouvés cadres. Dans cette ambiance d'impunité le vol de matériel et de production devint chronique.


Au vu de tout cela, oui, il s'agit bien d'anomie et le katechon ne semble pas prêt d'advenir de sitôt. Pourtant, la Corse a été touchée au moins une foi de façon flagrante par "la foudre d'Apollon" au cours de l'âge de bronze. Et le peuple Corse historique est toujours le même.


. Ceci nous rappelle les propos de Laurent Ozon à son départ de Bastia qui disait que la civilisation européenne ne pourra survivre que dans des "sanctuaires" identitaires homogènes tels que la Corse, qui a par dessus tout l'avantage d'être une île. La génétique prouve que nous sommes un des plus anciens peuple d'Europe. Dire que les américains sont une "race jeune" avec pour corollaire tacite que c'est à eux qu'appartient l'avenir confond les traits d'une jeunesse effective avec ceux d'un infantilisme régressif. Il suffit de prendre la conception traditionnelle pour que la perspective soit renversée. En dépit des apparences, les peuples récemment formés doivent êtres considérés comme les peuples les plus vieux, voir les plus crépusculaires, parce-qu’ils sont en dernier, justement, parce-qu'ils sont encore plus éloignés des origines selon la conception circulaire et cyclique Traditionnelle du monde .

L'avenir est en nous.


C'est d'ailleurs au regard des événements d'Ajaccio de Noël 2015 que ceux qui savent voir ont aperçus la réalité du katechon. Où bien encore à Bastia l'immense manifestation de soutien à ce supporter du SCB blessé par la police française. Le katéchon, c'est l'autonomisation du peuple! Sa spontanéité est fondée sur ses valeurs antiques, une capacité d'agir et par là même démontrer que la classe politique contemporaine n'est qu'une farce consensuelle. Les conservateurs actuellement dans l'opposition se sont bien gardés de condamner une action qui n'est que la pointe de l'iceberg de ce qui permet que notre forme de "paix civile armée" perdure malgré l'anomie.


Le katéchon est l'autonomisation traditionnelle du peuple par rapport aux structures politiques corruptrices et "anomiques". Le phénomène semble être né lors des avant-dernières élections territoriales quand les fidèles du Roccaserrisme ont réalisés que le Dauphin n'était pas dans la capacité politique, culturelle ou tout simplement humaine d'assurer les intérêts d'un peuple conservateur et à forte identité qui est le nôtre. Et au vu des réactions dans les médias, certains ont bien compris instinctivement que quelque chose leur échappait. Il ne s'agissait pas "d'une foule qui a détourné le sens du drapeau corse et les slogans du nationalisme". Un foule, c'est le peuple, le peuple, c'est la Nation. Et le drapeau corse n'appartient pas à une poignée de nouveaux caciques. Le drapeau corse appartient au peuple corse. Les corses n'ont nul besoin qu'on leur dise ce qu'il faut faire ou penser pour savoir ce qui est juste; ce qui exclut toute manipulation politique sur cette affaire absolument spontanée. L'Autonomie, capacité de se gouverner seul en tant que personne ou collectivité est une conception dangereuse, parce qu'en équilibre instable entre la centralité et l'abîme, mais fondamentale pour celui qui sent qu'il fait partie d'une longue tradition de liberté virile et de politique comme c'est le cas de tous les Corses et plus particulièrement de leurs élites idéologiques.


L'idée est que celui et ceux -car dans cette situation précise, le passage de l'unité à la collectivité est immédiat- qui est et sont équilibrés et donc, font partie de l'aristocratie révolutionnaire ou s'y réfèrent consciemment sont pour eux-mêmes, non pas n'importe quelle loi mais LA loi qui correspond au Cosmos et au rituel, qui implique le "droit à l'injustice".


La Corse frappée par "le Feu d'Apollon" ?





La loi commune, celle qui uniformise et stérilise est différente; en s’efforçant de réglementer, elle étouffe et crée immanquablement privilèges et corruption. Cette loi républicaine détruit l'énergie vitale. L'autonomie du peuple face aux factions politiques est fondamentale pour la liberté et la dignité; elle l'a toujours été. Pour que, contrairement à presque toutes les formes de fédéralisme et de régionalisme, elle soit supérieure au légalisme et à l'institutionnalisme et ne soit pas un facteur d'atomisation et d'individualisme, elle doit avoir un sens aigu de l'Imperium. Celui-ci est l'autorité du pouvoir, symbole axial, viril, du lien entre la terre et le ciel, à la façon symbolique de nos stantari proto-historiques. L'imperium donne de la verticalité et du sens à ce qui, autrement, est chaotique et informe. C'est sur l'axe de l'Imperium, qui donne une loi intérieure et entraîne automatiquement la reconnaissance de chaque communauté que se développe la conception classique et guerrière qui, au cours des siècles a préservé notre culture aujourd'hui menacée par l'anomie.


Admettons que le peuple corse "frappé par la foudre d'Apollon" soit en train d'engendrer une force nouvelle, que nous le voyons passer sous nos yeux du statut de "Volk" chtonien plus ou moins soumis à une clique à celui de faiseur de Patrie, mais à la lecture de Karl Schmitt et des Saintes Écritures, il ne s'agit que d'une réaction épidermique et purement localisée, sans portée sur l'Histoire.

En réalité, non. Nous devons entretenir le "feu d'Apollon" et le nourrir car les événements du Quartier de l'Empereur comme la mutilation du supporter du SCB ont créé les mêmes puissantes solidarités dans toute l'Europe. L'Europe des peuples; l'Europe charnelle épuisé par l'anomie et qui n'attend qu'un signal. Aussi fou que cela puisse paraître, à l'heure d'internet et bénéficiant d'une médiatisation à outrance, la Corse a les moyens de renverser ce monde. Il lui suffit d'en donner le signal. Le katechon sera ce flot de drapeaux sur tout notre continent, quand les peuples solaires relèveront la tête.


A Squadra

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